Tirésias. Cabaret pour (les) aveugles (que nous sommes)

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Tiresias. Cabaret pour (les) aveugles (que nous sommes) 

 

 

Durée 1h20.                                                                           

Texte et mise en scène Matthieu Pastore

Avec  Laurie Barthélémy, Nathalie Bourg, Chiara Breci, Pierre Cohen, Laura Desideri, Benjamin Dussud, Mathieu Petit & Camille Soulerin          

Chorégraphies Laura Maria Desideri

Ingénieur Son Clément Hubert

Les compositions musicales et les arrangements sont de Pierre Cohen

 

Tiresias est la déuxième création qui compose un tryptique précédé de Le Banquet. Not a Musical, not at all créé en 2020 et qui est lauréat du Prix Théâtre 13 / Jeunes metteurs en scène 2020 ainsi que du prix Nouveau Talent Théâtre SACD

Produit par la Compagnie Internationale  avec le soutien de la Maison du Théâtre et du CRESCO de Saint-Mandé ainsi que le Théâtre de l’Opprimé de Paris et Scènes sur Seine – Rencontres artistique d’Ile de France.

CALENDRIER 2021/2022

  • prochaine résidence de création en Avril 2022 à La Maison du Théâtre et de la Danse d’Epinay-sur-Seine
  • première en Janvier 2023 au Théâtre de l’Opprimé de Paris.
  • Mars 2023 au CRESCO de Saint-Mandé
  • Exploitation 2022/2023 et 2023/2024

NOTE

Il y a le mythe, d’abord. 

Tirésias a vu ce qu’il ne devait pas voir : la déesse Athéna nue; c’est la vérité, la beauté – c’est la même chose, peut-être. Pour cela il est puni, aveuglé. Pour cela il devient poète, devin. Tirésias a posé la main là où il n’aurait pas dû : il a séparé le coït des deux serpents; comme s’il avait mis le doigt dans l’engrenage de la Nature. Pour cela il est puni, dé-genré. Pour cela il sait la vérité, des vérités. Il se rit des dieux ? Tirésias ; à la fois homme et femme, il passe au cours de sa vie d’un genre à l’autre. Mais il est aussi entre le ciel et la terre, un humain presque divin, comme suspendu dans la poésie. Ni homme, ni femme ; ni mortel, ni dieu, et pourtant tout à la fois : une figure étrangement contemporaine. 

Il y a la figure, ensuite. 

Tirésias nous parle de nos identités, de ces costumes que l’on choisit ou dont l’on nous revêt. Comment ne pas y voir une singulière correspondance entre le métier de vivre (pour citer Cesare Pavese) et le métier du théâtre ? Tirésias est l’incarnation de l’hypothèse de soi : si j’étais une femme, moi; moi, si j’étais un homme (et, là, on cite Diane Tell), qu’est-ce que je serais, qu’est-ce que je saurais ? Il est certes puni, condamné à une identité plurielle. Mais il gagne un pouvoir immense, une liberté inouïe : le savoir et le rire, une poésie subversive. Avec audace et insolence, il parle, il voit, et ses mots sont des bombes sublimes, prêtes à exploser. 

*** 

Tirésias. Cabaret pour (les) aveugles (que nous sommes), c’est d’abord l’histoire d’un lieu. 

Existe-t-il encore, ce lieu ? Cet endroit des possibles à la fois populaire et exclusif, où le divertissement devient subversif et, donc, politique : le cabaret. C’est une boîte noire, pleine de lumière, où montrer le “show”, où spectateurs et acteurs font voir une identité nouvelle, dé-codifiée des codes du monde, re-codifiée dans le plaisir, la joie, la fête. 

C’est aussi l’histoire d’une époque. 

Quand sommes-nous ? A la veille de quelque chose, comme toujours. Il y a de l’électricité dans l’air, comme avant l’orage, un instant avant le déluge. C’est l’époque de la crise, la nôtre, celle des bouleversements, des choix et des engagements. Des années ‘20, des années ‘30 qui viendront, semblables à celles du passé, lointaines. Le cabaret est le lieu de l’éblouissement, où l’on jouit de nos aveuglements, où l’on ouvre grand les yeux sur ce que d’habitude on voile. Alors que nous reste-t-il à faire, comme d’autres avant nous, sinon noyer nos peurs – noyer nous-même – dans l’ivresse de la nuit ? 

Et c’est surtout l’histoire de Tirésias. 

Qui est Tirésias, aujourd’hui ? C’est la question qu’il faut poser : qui est cette figure – plurielle, peut-être – poétique et divinatoire ? Qui est cette créature qui nous parle de jouissance, qui ignore et connaît les genres, qui nous libère et nous élève ? Est-elle en nous ou hors de nous ? Fait-elle partie de la société, ou en est-elle aux marges ? On pourrait oser : naît-on Tirésias ou le devient-on ? 

Matthieu Pastore